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Fortune improductive : la France ajuste sa fiscalité du patrimoine

Le vote intervenu vendredi soir à l’Assemblée nationale marque le retour discret d’une fiscalité redessinée pour les patrimoines les plus lourds : à noter que l’ancien Impôt sur la fortune immobilière (IFI) n’est pas remis à zéro, mais rebaptisé impôt sur la fortune improductive, avec une assiette élargie et un taux abaissé — une retouche limitée mais symbolique du débat sur la fiscalité du patrimoine.

Une réforme qui change peu… mais change

Cette mesure propose de transformer l’IFI — qui ne concernait que les biens immobiliers — en impôt sur la fortune improductive, incluant désormais certains biens meubles, collections, yachts voire assurances-vie « non productives ».

Le taux applicable est fixé à 1 % pour ces nouveaux biens, mais réduit d’environ un tiers pour les très hauts patrimoines par rapport à ce que certains amendements proposaient. L’ombre de l’ancien impôt de solidarité sur la fortune (ISF) plane, mais l’important est de voir que la mesure ne vise pas à rétablir l’ISF dans sa forme initiale.

À noter : le gouvernement s’est officiellement dit opposé au retour d’un ISF généralisé, ce qui limite la portée de la réforme.

Pour qui ? Qui perd, qui gagne ?

Le dispositif vise avant tout les biens « improductifs », c’est-à-dire ceux qui ne génèrent pas de revenus locatifs ou d’activité économique. Cela signifie un impact différent selon les catégories :

  • Retraités ou détenteurs de résidences locatives bénéficieront d’abattements ou d’exclusions ;
  • Les « petits millionnaires », possédant peu ou pas de biens générateurs de revenus, sont les plus concernés ;
  • Pour les grandes fortunes disposant de nombreuses formes d’actifs productifs, l’effet pourrait être moindre.

Voici un tableau pour illustrer :

Catégorie patrimoniale Biens visés Effet probable
Résidence principale ou bien loué Exclu ou abattu Peu ou pas impacté
Bien immobilier non loué + collection Inclus dans l’assiette Hausse d’imposition
Actifs professionnels ou immobiliers productifs Exclusion prévue Effet limité
Très haute fortune diversifiée Assiette large, mais réduction de taux Effet mitigé

Attention : le rendement budgétaire reste flou, et la mesure semble plus symbolique que révolutionnaire.

Conséquences et limites de l’initiative

Cette réforme entraîne plusieurs implications :

L’élargissement de l’assiette signale une volonté de taxer davantage les patrimoines « oubliés » de l’IFI.

Le taux unique, plus simple qu’un barème progressif, suppose une simplification mais aussi un risque d’équité moindre selon les niveaux d’actifs.

Important : le rendement pour l’État n’est pas encore estimé avec précision — la réforme est modeste et pourrait rapporter bien moins que ce que certains observateurs espéraient.

À noter aussi que la mesure reste soumise à l’approbation finale dans le cadre du budget 2026 ; rien n’est gravé dans le marbre.

Enfin, l’alliance politique hétéroclite (Mouvement démocrate, Parti socialiste, Rassemblement National) qui a permis l’adoption de l’amendement montre combien la réforme est avant tout tactique plus que structurelle.

Que peuvent faire les patrimoines concernés ?

Pour ceux qui pourraient être concernés par l’impôt sur la fortune improductive, voici quelques actions recommandées :

  • Vérifier si leurs biens entrent dans la nouvelle définition « improductive ».
  • Simuler l’impact fiscal à moyen terme en fonction du taux de 1 % et de l’abaissement annoncé.
  • Optimiser la classification de leurs actifs : distinguer les biens générateurs de revenus (exclusion potentielle) de ceux qui ne le sont pas.
  • À noter : anticiper la rédaction finale du texte — des ajustements sont encore possibles en navette parlementaire.
  • Garder un œil sur le seuil d’entrée dans l’assiette et les éventuelles exonérations ou abattements prévus.

L’impôt sur la fortune improductive marque une retouche signifiante mais limitée du paysage fiscal patrimonial français. Il n’incarne ni le grand soir fiscal espéré par certains militants de la justice sociale, ni la franche déroute pour les ultra-riches redoutée par d’autres. Il s’agit plutôt d’un compromis : élargir l’assiette tout en modérant le taux.

À noter que son impact réel — tant en matière de recettes pour l’État qu’en équité fiscale — dépendra largement des modalités finales d’application et de la rédaction de la loi de finances pour 2026.

Julien Varnel

Journaliste économique, partage depuis plusieurs années des analyses approfondies sur les thématiques d’investissement, de fiscalité et de retraite. Son objectif : rendre l’information économique fiable, pédagogique et accessible à tous les lecteurs soucieux de mieux gérer leur patrimoine.

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